La saison des pluies est au rendez-vous. Ce phénomène, bien que naturel, est amplifié par divers facteurs qui rendent les populations particulièrement vulnérables.
Les récentes pluies diluviennes qui ont frappé la capitale gabonaise, ainsi que d’autres régions du pays, ont une fois de plus mis en évidence la vulnérabilité de nombreuses zones urbaines face aux intempéries. Les populations les plus fragiles sont les premières victimes de ces catastrophes naturelles amplifiées par l’activité humaine.
Si le changement climatique joue un rôle indéniable en intensifiant les événements météorologiques, il n’est pas seul responsable de l’ampleur des inondations au Gabon.
L’urbanisation, souvent anarchique, a profondément modifié le paysage et l’équilibre naturel. L’occupation des zones à risques, les pratiques de construction inadéquates et la gestion défaillante des déchets aggravent la situation.
En effet, la croissance démographique rapide de Libreville exerce une pression considérable sur l’aménagement du territoire, poussant les populations à s’installer dans des zones à risques. Les constructions illégales et celles réalisées sans étude préalable et l’obstruction des cours d’eau par les déchets, ont considérablement réduit la capacité d’absorption des sols et favorisé le ruissellement des eaux de pluie à la surface.
Parallèlement, il y a la problématique des bassins versants, qui ont pour rôle d’accueillir les eaux de pluie et les diriger vers les cours d’eau.
À Libreville, par exemple, les bassins versants sont de petite taille et fortement urbanisés. Or, l’urbanisation, souvent anarchique, a profondément modifié leur fonctionnement naturel.
L’imperméabilisation des sols due aux constructions en zones marécageuses, l’obstruction des canalisations par les déchets et la réduction des zones vertes ont altéré la cartographie des cours d’eau. Les eaux de pluie ne peuvent plus s’infiltrer dans le sol et ruisseler rapidement, entraînant leur montée inattendue et violente. Ces ruissellements intenses provoquent l’érosion des sols et une dégradation de la qualité de l’eau à l’origine de la perte de biodiversité. Mais encore, une fois stagnantes, ces eaux favorisent la prolifération des moustiques et d’autres vecteurs de maladies.
Les inondations à Libreville ont des conséquences sur le long terme. Au-delà des pertes en vie humaines, des pertes matérielles et du déplacement des populations, elles ont un impact significatif sur l’économie locale. Les activités commerciales sont paralysées, les infrastructures endommagées et les coûts de reconstruction élevés.
Selon les estimations, environ 0,21% de la population gabonaise est potentiellement touchée par les inondations, avec des concentrations élevées dans certaines provinces. Entre 2013 et 2021, 6120 ménages ont été affectés par les inondations selon les données du ministère de l’Intérieur.
Économiquement, les zones touchées par les inondations absorbent environ 0,22% du PIB national, soit près de 30 millions de dollars chaque année.
Face à cette situation d’urgence, il est impératif de mettre en œuvre des solutions durables adaptées au contexte local. Une approche globale et coordonnée est nécessaire, impliquant les pouvoirs publics, les scientifiques, les acteurs de la société civile et les populations.
Il devient impératif de conserver et de restaurer les mangroves et les zones humides acteurs essentiels de la régulation du cycle des eaux.
Les pratiques de construction et d’urbanisme doivent être revues pour éviter de construire dans les zones à risques et promouvoir des modes de construction durables.
La mise en place de systèmes de collecte et de traitement des déchets performants, associés à un assainissement régulier des canalisations, permettront de réduire l’obstruction des canalisations et des cours d’eau.
La sensibilisation aux risques d’inondation, la formation aux gestes de premiers secours en période pluvieuse et la mise en place de réseaux de solidarité sont autant d’actions qui peuvent renforcer la résilience des communautés.
Examinant les bassins versants, la restauration des cours d’eau dans la mesure du possible, la création de zones humides et la végétalisation des espaces urbains peuvent contribuer à améliorer la gestion des eaux pluviales. Ensuite, les plans d’urbanisme devraient s’imposer une dimension environnementale et prendre en compte les risques y relatifs.
Pour améliorer les conditions de vie des populations et préserver l’environnement, il est impératif que les pouvoirs publics accompagnent les initiatives locales et renforcent le contrôle de l’urbanisme au Gabon.
Les inondations récurrentes à Libreville sont un symptôme d’un modèle de développement urbain non durable et anarchique. Pour faire face à ce défi, l’urgence est de repenser les modèles urbains, en privilégiant une approche plus respectueuse de l’environnement et des équilibres naturels. (Source : UNDRR ;GABON 24 ; Les Cahiers Nantais)